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« Mortuos Plango » de Jonathan Harvey: quand la musique fait sonner la cloche !

Mortuos Plango de Jonathan Harvey: Comment les partiels de la cloche ont été utilisés pour créer une œuvre électro-acoustique révolutionnaire

Je vous appelle les vivants, je pleure les morts, je brise les éclairs, ayez pitié, Seigneur, du peuple que vous avez racheté de votre sang. Anno Domini MCCXXXVI.
Le titre « Mortuos Plango, Vivos Voco Je pleure les morts, j’appelle les vivants » fait référence au pouvoir des cloches dans la vie religieuse et spirituelle. En effet, les cloches ont traditionnellement été utilisées pour appeler les fidèles à la prière, mais aussi pour sonner lors des funérailles en signe de deuil et de respect pour les morts.. En effet, la cloche qui a inspiré le titre « Vivos Voco » est bien située à la cathédrale de Winchester. La cloche en question s’appelle « The Great Bell of Winchester » ou « The Winchester Quarters« , et elle a été fondue en 1525. Elle est considérée comme la deuxième plus grande cloche médiévale en Angleterre.

Mortuos Plango, Vivos Voco : une œuvre de Jonathan Harvey alliant technologie et spiritualité

Mortuos Plango, Vivos Voco est une œuvre majeure de Jonathan Harvey, compositeur anglais contemporain reconnu pour la qualité et l’ampleur de son œuvre ainsi que pour la profondeur spirituelle de sa pensée. Cette composition pour support-fixe, créée en 1980 à l’Ircam, associe le son d’une cloche et une voix d’enfant, explorant ainsi l’univers sonore et les possibilités technologiques de l’époque.

Exploration du timbre et préoccupations spirituelles

Jonathan Harvey utilise dans Mortuos Plango, Vivos Voco deux matériaux concrets : le son d’une cloche et une voix d’enfant. Cet assemblage, subtilement traité à l’aide de ressources informatiques, reflète une pensée musicale complexe mais également les préoccupations spirituelles du compositeur, qui mêle les traditions bouddhistes et chrétiennes ainsi que les philosophies orientales et occidentales.

Une esthétique de l’ambiguïté

Mortuos Plango, Vivos Voco témoigne de la maîtrise de Jonathan Harvey dans l’utilisation des processus et des ressources informatiques disponibles à l’époque de sa création. Cette œuvre conjugue les influences spectrales et post-sérielles pour offrir une esthétique de l’ambiguïté, où la complexité de la pensée musicale se met au service d’un discours à la fois profond et énigmatique Le titre de l’œuvre reflète son thème central, à savoir la vie et la mort. Les sons concrets de cloches et de cris représentent la mort, tandis que les sons électroniques créent un contraste avec leur caractère plus éthéré et représentent la vie. Harvey a souhaité créer une expérience sonore immersive qui reflète l’importance de la vie et de la mort dans notre existence.

L’utilisation des partiels de la cloche

L’une des caractéristiques les plus remarquables de cette pièce est l’utilisation des partiels de la cloche. Harvey a enregistré le son d’une cloche et a ensuite isolé les différents partiels ou harmoniques qui composent le son de la cloche. Les partiels sont des fréquences multiples de la fréquence fondamentale de la cloche et ils produisent des tons qui sont en accord avec la note fondamentale. Harvey a ensuite transformé les partiels de la cloche en sons électroniques en utilisant des techniques de synthèse sonore. Les sons électroniques ont été manipulés et transformés pour créer une composition musicale complexe et expressive.

L’importance des partiels dans Mortuos Plango

L’utilisation des partiels de la cloche dans Mortuos Plango est importante et a ouvert de nouvelles possibilités pour les compositeurs de musique électronique, qui ont commencé à explorer de nouveaux sons et à créer de nouvelles formes musicales. En outre, l’utilisation des partiels de la cloche dans Mortuos Plango est importante sur le plan esthétique. La cloche est un instrument qui est souvent associé à la mort et au deuil, et Harvey a utilisé les partiels de la cloche pour créer une atmosphère sombre et mélancolique dans sa composition. Les sons électroniques créent une ambiance mystérieuse qui évoque des sentiments de tristesse et de perte.p >La musique est « octophonique », projetée dans l’auditorium à travers un cube de huit canaux. Les huit sections sont basées sur l’un des huit partiels les plus bas. Les accords sont construits à partir d’un répertoire de trente-trois partiels de la cloche et les modulations d’une zone du spectre à une autre sont réalisées au moyen de glissandi. L’organisation de la pièce, « modulant ‘d’une grande cloche à une petite cloche' », peut être « interprétée de plusieurs façons ».

Les techniques utilisées dans l’œuvre

« Mortos Plango, Vivos Voco » est une œuvre complexe et innovante qui utilise une variété de techniques électroacoustiques pour créer une expérience sonore unique. Elle mélange des sons concrets tels que des cloches et des sons électroniques créés par ordinateur. Ces sons sont ensuite traités et modifiés pour créer des effets de spatialisation et de réverbération qui renforcent l’immersion sonore de l’auditeur.

L’analyse de la pièce

La musique est « octophonique« , projetée dans l’auditorium à travers un cube de huit canaux. Les huit sections sont basées sur l’un des huit partiels les plus bas. Les accords sont construits à partir d’un répertoire de trente-trois partiels de la cloche et les modulations d’une zone du spectre à une autre sont réalisées au moyen de glissandi. L’organisation de la pièce, « modulant ‘d’une grande cloche à une petite cloche' », peut être « interprétée de plusieurs façons ».  

La place de l’œuvre dans la carrière de Jonathan Harvey

  « Mortos Plango, Vivos Voco » est remarquable à la fois dans et en dehors de la carrière de Harvey : « elle a montré que le programme de recherche apparemment ésotérique de l’IRCAM pouvait produire de la musique capable de séduire un public plus large » et elle « poursuit le processus, établi dans le Quatuor à cordes, d’initier une œuvre par l’investigation détaillée d’un seul son – dans ce cas, la cloche de Winchester ».

Conclusion

En conclusion, Mortuos Plango de Jonathan Harvey est un exemple remarquable de l’utilisation créative de la technologie dans la musique électronique. L’utilisation des partiels de la cloche a permis à Harvey de créer une composition musicale complexe et expressive qui évoque des sentiments de tristesse et de perte. La pièce est un chef-d’œuvre de la musique électronique et reste une référence pour les compositeurs contemporains qui cherchent à explorer de nouveaux sons et de nouvelles formes musicales

Informations générales
Date de composition : 1980
Durée : 9 mn
Éditeur : Faber Music
Commande : Ircam
Genre
Musique électronique / sur support / instruments mécaniques [Musique électronique / sur support / instruments mécaniques]
Information sur la création
Date : 30 novembre 1980
Lieu : France, festival de Lille.

Cette œuvre reflète mes expériences à la cathédrale de Winchester où mon fils Dominique a été choriste de 1975 à 1980. Elle est fondée sur sa voix et sur celle de la grande cloche ténor. Cette énorme cloche noire d’une puissance surhumaine porte en inscription : « Horas avolantes numero mortuos plango : vivos ad preces voco » (« Je compte les heures qui s’enfuient, je pleure les morts : j’appelle les vivants à la prière »). Ce texte est repris par la voix du jeune garçon. La hauteur et la structure temporelle de mon oeuvre sont entièrement fondées sur le spectre très riche et harmoniquement irrégulier de la cloche, structure qui n’est ni tonale, ni dodécaphonique, ni modale à la manière occidentale ou orientale mais tout à fait unique.
Les huit sections de l’œuvre reposent chacune sur l’un des huit principaux partiels les plus bas. Les accords sont construits à partir d’un répertoire de 33 partiels ; les modulations entre les différentes zones du spectre sont effectuées par des glissandi.
Des transformations constantes entre le spectre d’une voyelle chantée et celui de la cloche sont réalisées par des manipulations sur les composantes internes des deux sons. Il faut imaginer que les murs de la salle de concerts enserrent le public comme les côtés de la cloche autour de laquelle vole librement l’âme du jeune garçon (cet effet est surtout perceptible dans la version originale huit pistes).
Jonathan Harvey.

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